Ce
récit est très étonnant pour un lecteur actuel.
Le
narrateur, un certain Théo Kornfeld, est un jeune homme rescapé d’un camp de
concentration à la fin de la seconde guerre mondiale. Son problème majeur n’est
donc pas sa survie durant les mois sinistres passés entre les mains des nazis,
mais celui du retour. Il entame une longue marche pour regagner sa demeure
familiale. Sur sa route, il croise d’autres humains tout aussi fantomatiques
que lui. Tous entretiennent avec le retour un rapport très complexe, et pas
seulement en raison de leur état physique. La prononciation de mots résonne de
la souffrance endurée : les uns ont perdu le pouvoir de la langue, les
autres s’y refusent ; d’autres encore l’utilisent pour une forme de
justice. Tous incarnent l’immense solitude de ces êtres rescapés de
l’innommable qui doivent entamer un long processus de retour vers une autre
forme de néant, puisque tous les univers physiques, affectifs et psychologique
ont été pulvérisés par l’horreur hitlérienne.
Et si
ce « roman » surprend, c’est parce que nous sommes peu habitués à
lire ce qui se passe après la libération des camps pour ceux qui en reviennent.
La forme romanesque permet à son auteur d’interroger autrement l’impuissance de
la langue et le silence choisis par certains survivants.
Conseil
de lecture : A lire, après avoir lu La
disparition de Josef Mengele. Ainsi, Olivier Guez et Aharon Appelfeld
donnent à entendre les deux versants opposés de ceux qui ont vécu dans les
camps. Pourtant, entre le bourreau et la victime, la fin de la guerre apporte
un même questionnement : quelle reconstruction familiale ? Quel
rapport à autrui et à la solitude ?
Deux livres
indispensables pour que jamais les générations suivantes n’oublient.
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La Disparition de Josef Mengele (Prix Renaudot 2017) est aussi à la bib, bien sûr!
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