Son fils Eduard a vingt ans au
début des années 1930 quand sa mère, Mileva, le conduit à l'asile. Il finira
ses jours parmi les fous, délaissé de tous, dans le plus total dénuement. Grâce
à ce roman qui entrecroise les vies séparées d’Albert
Einstein, de sa première femme Mileva Maric et du plus jeune de ces fils :
Eduard, Laurent Seksik nous offre un roman passionnant qui garde en toile de
fond les évènements mondiaux de la période de 1930 aux années 50.
L’auteur aurait pu accabler Albert Einstein, coupable d'avoir divorcé d'une femme admirable qui lui avait sacrifié sa propre carrière (la boiteuse Mileva fut la première femme à intégrer l’école polytechnique de Zurich), d'avoir laissé son fils cadet végéter plusieurs décennies dans un établissement psychiatrique de Zurich (le Burghölzli), ou encore d'avoir abandonné, des années auparavant, sa petite Lieserl née avant mariage dans la famille serbe de sa femme... Mais non, par le traitement à trois voix : Mileva la mère courage et souffreteuse, Albert le père volage et meurtri, Eduard le fou attachant, Laurent Seksik réussit à démêler les ficelles du drame familial, exacerbé par les tragédies criminelles du siècle.
Chacun des trois personnages
intervient à son tour et à chaque fois c’est un éclairage particulier sur un
évènement familial : la séparation, les premières crises de schizophrénie
d’Eduard, la montée du nazisme et la fuite d’Albert d’Allemagne, les traitements
violents infligés à Eduard (insulinothérapie, électrochocs), la mort de Mileva
qui consacrera sa vie et ses dernières forces à soutenir et protéger cet
homme-enfant qu’est devenu Eduard, puis la mort d’Elsa la seconde femme
d’Albert, les démesures du maccarthysme et la vindicte du FBI lors de l’exil
américain, également le ressentiment de son fils aîné Hans-Albert.
Albert Einstein aura tout
affronté mais sa famille également. Comment exister derrière un père célèbre
qui ignore ses fils? Albert dira adieu à Eduard au Burghölzli en 1933 lors de
son départ vers les États-Unis et ne le reverra jamais. Si le grand homme a le
courage de défendre de belles causes : ségrégation, mauvais usage du
nucléaire, il n’aura jamais eu celui de revoir son fils.
Extrêmement bien construit et
écrit, ce livre lève le voile sur Einstein personnage public en le décrivant
dans les relations avec sa famille. Un père absent dont le fils Eduard est son
talon d'Achille... Un roman passionnant, touchant et troublant à ne pas
rater !
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Du même auteur, nous vous proposons aussi:
La Légende des fils
Les Derniers jours de Stefan Zweig
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