Le voyage dans l'Est - Christine Angot

 

 

 

En ouvrant ce livre, après avoir lu "La Familia grande" de Camille Kouchner et "Le consentement" de Vanessa Spingora, j'ai pensé: "Encore un ouvrage sur le harcèlement sexuel d'un adolescent par un adulte." Après l'avoir terminé, je crois qu'il était nécessaire et, à coup sûr, courageux.

 

La situation de Christine Angot est encore plus traumatisante que celle de Vanessa Spingora: il ne s'agissait pas de son propre père (même si Matzneff apparaît comme un substitut paternel). Christine Angot est elle-même la victime, contrairement à Camille Kouchner qui relate l'expérience de son frère. Christine est harcelée par son père qui a quitté sa mère avant la naissance de l'enfant et qui décide de rencontrer pour la première fois sa fille et de la reconnaître alors qu'elle a 13 ans.

C'est un rêve pour cette jeune adolescente, privée de père, et qui va découvrir un homme séduisant physiquement et intellectuellement (il est traducteur au Conseil de l'Europe). Mais, en la soumettant, de l'âge de 13 ans à celui de 26 ans (auquel elle refuse de le rencontrer) au rituel de l'inceste, lui manifestant ainsi un déni de filiation.

Elle est tellement admirative de cet adulte qui use, pour la séduire, de sa supériorité d'homme, d'intellectuel, d'adulte, qu'elle ne veut pas le décevoir même si elle l'implore lors de leurs rencontres d'avoir avec elle une "relation normale".

Et c'est l'engrenage dont elle ne sortira qu'au bout de 13 ans, meurtrie et traumatisée à jamais.

Christine Angot rappelle ses souvenirs sans pathos dans une écriture lapidaire analysant froidement ce qu'elle a subi.

Cette lecture est glaçante tant par ce que l'auteur a vécu que par le traumatisme qu'elle en garde et qui fait de l'inceste un thème récurrent dans une oeuvre.

Prix Médicis 2021.

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